- En fait, tu prends tes photos au pif !
- Tu crois ? Bouge pas, je vais t'expliquer 2 ou 3 trucs.
Je ne compte plus le nombre de fois où l'on m'a dit que je prenais mes photos au hasard. Ou que j'avais la tremblotte. Ou qu'il fallait que je change mes lunettes parce que je voyais flou.
C'est tellement classique de voir les saillies de tous ces Jean-Michel Relou que je me suis mis à collectionner les captures d'écran de tous ces commentaires. Elles sont rangées dans un dossier que j'ai baptisé "Les Enclumes d'Or", histoire de rendre hommage à la lourdeur de ces personnages.
D'ailleurs, quand j'étais encore actif sur Facebook, sous ces commentaires à l'humour étroit d'esprit, je postais une photo de cette enclume d'or, pour les féliciter.

Composante aléatoire > photos au pif
Mais revenons à notre sujet. Cette croyance selon laquelle je ferais mes photos au pif.
Alors, oui, je le dis assez souvent lors de mes interventions en public, l'aléatoire est une composante essentielle de mes photos. Il se manifeste essentiellement dans les mouvements que j'exécute lors des prises de vue.
C'est grâce à lui (ou à cause de lui, c'est selon), que je ne peux jamais faire 2 fois de suite la même photo. Ainsi, quand je dis que mes photos sont uniques, c'est déjà vrai au sens littéral du terme.
Mais pour autant, l'aléatoire n'a rien à voir avec le pifomètre.
- Le pifomètre, c'est le hasard total, le chaos sans réflexion, une intervention sans maîtrise ni intention.
- L'aléatoire, on peut le guider et en limiter les conséquences par une réflexion en amont sur le résultat convoité et l'adaptation de la technique utilisée.
Je vous explique.
Photo conventionnelle VS photo ICM : le match.
Soutenir que je fais mes photos au pif, c''est ignorer le processus technique nécessaire pour aboutir à mes images.
Alors, on va comparer les éléments nécessaires à maîtriser dans la photo classique, et ceux à maitriser en photographie ICM.
Ce n'est pas souvent que je parle de technique, alors profitez-en.
ICM : Intentional Camera Movement, ou mouvement intentionnel de l'appareil. C'est la technique que j'utilise pour créer mes photos. Elle consiste à mouvoir volontairement l'appareil photo pendant le temps de pose.
Si vous voulez vous lancer dans cette technique, j'ai rédigé un guide qui vous aidera dans vos premiers pas et vous évitera bien des galères.
Photo conventionnelle - starter pack
Pour faire une photo "classique", il faut maîtriser avec son appareil photo :
- L'ouverture du diaphragme ;
- Le temps de pose ;
- La sensibilité (les ISO) ;
- Et avoir un minimum de notions de composition.
Maîtriser tous ces paramètres est déjà un gros boulot. Mais heureusement, il existe des flopées de livres, des milliers de tutos sur Youtube et des centaines d'heures de formations (payantes mais quand on veut de la qualité…) pour vous aider.
Vous n'êtes pas seuls dans votre quête de photo conventionnelle.
Photographie ICM - le minimum du minimum à dompter
Pour faire une photo comme les miennes (avec mouvement de l'appareil), il faut maîtriser :
- L'idée du résultat vers lequel on souhaite tendre (ça conditionne le reste) ;
- L'ouverture du diaphragme ;
- Le temps de pose ;
- La sensibilité (les ISO) ;
- Le type de mouvement ;
- La direction du mouvement ;
- L'amplitude du mouvement ;
- La vitesse du mouvement ;
- Le moment du déclenchement;
- Le moment du cadrage et de la composition.
Par ailleurs, il faut gérer les points 5 à 10 pendant les quelques dixièmes de secondes du temps de pose.
Ainsi, faire une photo soi-disant au pif requiert plus d'aptitudes techniques qu'une photo conventionnelle.
Heureusement, il existe des flopées de livres, des milliers de tutos… ah, en fait, non, il n'existe quasiment rien pour pour vous aider à maîtriser tous ces points.
Certes, mon guide (dont j'ai parlé juste au-dessus) aidera les photographes les plus curieux à se lancer, mais seule l'expérience accumulée permet de dominer le sujet et de réussir des images qui sortiront de l'ordinaire.
On est quand même à des années-lumière d'une photo prise au pifoscope à lunettes, sans maîtrise.
Tiens, je vous donne un exemple.
1 seconde pour un fragment de rêve.
Cette photo fait depuis longtemps partie de mes images préférées. Elle est quasiment de toutes mes expositions.
Pour la réaliser, je voulais que le rayon de lumière soit positionné juste en-dessous des vestiges de l'abbaye et du phare. Et pour que la photo ait du sens, il fallait aussi que ceux-ci restent suffisamment visibles, et pas transformés en une trainée grisâtre informe.
Avec cet objectif de résultat en tête, il a fallu que je dose mes mouvements pour aller chercher la lumière du soleil (qui était hors cadre) et la positionner pile sous l'ensemble. Il fallait également choisir le moment exact où déclencher, et s'attarder le temps nécessaire pour fixer l'empreinte du phare et de l'abbaye.
Tout ça en 1 seconde chrono.
Alors, évidemment, je n'y suis pas arrivé du premier coup. Je m'y suis repris une quinzaine de fois avant d'obtenir ce que je convoitais.
Et petite difficulté supplémentaire, parce que ça aurait été sinon trop simple : le temps était compté car le soleil disparaissait très rapidement sous la ligne d'horizon. Et sans soleil, plus de photo.

Posé sur la lumière
Allez découvrir dans mes galeries d'autres exemples, et demandez-vous pour chacune des photos qui vous caressent les yeux, si vraiment je les ai obtenues au petit bonheur la chance et en faisant n'importe quoi.
Quand tu as une constante dans tes photos ce n est plus du piff ,mais du travail 👍
J’aimerais bien avoir ce pif là 😂
Sérieusement, Manu, votre travail et votre style sort des sentiers battus
Merci Denise !
Bonjour Manu,
Hélas, tu auras toujours ce style de commentaire, toi ou les autres.
Depuis que le net est à la portée de tous, les « Monsieur je sais tout » pullulent sur la toile et on dirait que leur but est un concours de débilité et s’en donnent à coeur joie dans les remarques négatives, alors qu’ils sont incapables d’en faire le dixième. Plus on avance dans le temps, plus on s’aperçoit que « parler pour ne rien dire » est devenu une normalité.
Continu à faire de belles photos qui sortent de l’ordinaire et parfois nous envoûtent.
Cdlt
Merci Régine, et je compte bien continuer. Quant aux trolls divers et variés, je les laisse à la seule place qu’ils méritent : dans l’océan de mon indifférence.