Il y a quelques semaines, j’avais vu passer cette annonce du site américain The Phoblographer, qui cherchaient des témoignages de personnes créant des photos artistiques, mais sans utiliser Photoshop. S’ils en sont à chercher, c’est que visiblement ça ne court plus trop les rues.

J’ai répondu à leur questionnaire et je leur ai fait parvenir quelques images de ma série Mondes d’ailleurs.

Et puis voilà.

Moi, petit photographe français, je ne me faisais pas beaucoup d’illusions sur mes chances d’être publié sur un des plus gros sites américains qui parlent de photos. 

Parce que, oui, The Phoblographer, c’est pas un petit Skyblog alimenté à l’arrache les dimanches de pluie. Les chiffres (trouvés sur leur site) sont plus que respectables :  

Et finalement, petite surprise ce 29 avril, avec la parution sur mon fil Twitter d’une de mes photos que je n’avais pourtant pas posté. C’était mon témoignage qui était mis en ligne !

Comme tout le monde ne maîtrise pas l’anglais je vous ai traduit l’article.

Emmanuel Munier crée des photos de paysages qui ressemblent à des peintures

Je suis Emmanuel Munier. Je suis un photographe autodidacte qui crée des paysages abstraits.

J’ai découvert la photographie ICM (Intentional Camera Movement) il y a 2 ans, and cela a radicalement changé ma façon de photographier ma région. J’aime le côté aléatoire de cette technique, on ne peut pas vraiment prévoir l’image qu’on obtiendra, et on ne peut jamais la reproduire exactement une deuxième fois.

Toutes mes photos sont des prises uniques (pas de Photoshop, évidemment, pas multi-exposition).

Je n’aime pas prendre les paysages en photo de la même façon que les dizaines de photographes qui viennent dans ma région.

Je suis donc constamment à la recherche de nouvelles façons de photographier ou de nouveaux points de vue, et la photo ICM offre cela. C’est aussi une excellente manière d’obtenir des images oniriques de paysages imaginaires.

Mon travail transportera les lecteurs dans ces paysages oniriques : des mondes ailleurs sans limites.

Pourquoi vous êtes-vous lancé dans la photographie ?

Je me suis lancé dans la photo car j’ai toujours aimé le pouvoir des images.

Avec une image, vous pouvez dire beaucoup plus qu’avec des mots. Vous pouvez raconter des histoires, vous pouvez imaginer différemment le monde et votre quotidien.

Quels sont les photographes qui vous ont le plus influencé ? Comment ont-ils influencé ce que vous êtes et votre façon de créer ?

Ma première influence était Philip Plisson, un photographe français spécialisé dans les paysages marins. La première fois que j’ai vu ces images, j’étais impressionné par le le calme et l’authenticité qui se dégageaient de scènes simples.

Beaucoup d’autres photographes m’ont aussi influencé (Todd Hido et ces mystérieuses photos de nuit, Raymond Depardon et ces photos verticales de paysages vides…).

Le dernier photographe à avoir eu une grosse influence sur moi est Andrew Gray : ses paysages abstraits sont phénoménaux. Découvrir son travail a été pour moi le déclencheur pour aller au-delà de ce que je faisais habituellement.

Depuis combien de temps photographiez-vous ? Comment pensez-vous avoir évolué depuis vos débuts ?

Je photographie depuis 12 ans environ, mais plus sérieusement depuis 2016. Ma pratique a évolué de la photo traditionnelle de paysages marins vers quelques chose de plus mystérieux et de plus abstrait.

Parlez-nous de votre identité photographique.

Je suis un photographe français, vivant en Bretagne (à l’extrême ouest de la France), à proximité de l’océan. Vivre ici, évidemment, aide pour photographier les paysages marins et pour apprendre à gérer les caprices de la météo et de la lumière naturelle.

Mon identité photographique est faite de couleurs, de flous, de mouvement, et de mélanges d’éléments qui n’ont aucune raison de se rencontrer (comme par exemple un phare flottant dans les nuages).

Parlez-nous du matériel que vous utilisez.

J’utilise un Panasonic G9 (micro 4/3), et principalement l’objectif 12-60 f/3.5-5.6. Les autres objectifs que j’utilise est le 45-200mm  f/4.5-5.6, l’ultra grand angle 7-14mm f/4 et le 20mm f/1.7.

J’ai choisi le Panasonic G9 car j’aime sa légèreté et sa compacité comparé aux full frame et aux reflex. C’est un gros avantage en ICM si vous ne voulez pas attraper une tendinite au poignet après une heure de shooting.

Mais la vérité est que je ne suis pas un grand fan du matériel. Pour moi, c’est l’aspect le moins intéressant de la photographie. Aucun photographe n’a été exposé parce que son capteur avait des milliards de pixels, mais parce que son travail le méritait.

Lumière naturelle ou artificielle ? Pourquoi ?

Uniquement lumière naturelle.

Pourquoi la photographie est-elle si importante pour vous ?

Mon job est très prenant. La photographie est mon oxygène et mon échappatoire.

Comment le matériel vous aide-t-il à créer ?

Le matériel n’a pas de réelle influence. Ce sont le mouvement, découvrir des sites, marcher sur les sentiers, la lumière et la météo qui m’aident à créer mes images.

Qu’est-ce qui typiquement vous passe par la tête quand vous créez des images ?

La création de mes images se fait en 2 étapes : prendre les photos et les traiter en post-production.

Quelquefois, avant de partir faire une sortie photo, je détermine un endroit et un sujet à photographier. Mais la plupart du temps, j’erre un peu au hasard sur les sentiers et je trouve le sujet.

Quand je shoote, j’ai besoin de me vider la tête et de m’approprier l’endroit. Et évidemment, ça prend du temps. Je n’aime pas shooter dans l’urgence. Et quand je shoote, je fais des mouvements variés, fluides ou saccadés.

La deuxième partie de la création, la post-production, est quand l’image finale apparaît. Il s’agit de rechercher le bon équilibre entre le flou, les couleurs, les contrastes, l’abstraction… pour obtenir une image qui transmet le message que je lui destine.

Emmenez-nous s’il vous plait dans votre processus technique? Et dites-nous aussi comment vous réalisez votre écriture sans Photoshop et si vous êtes à l’aise avec ça.

Mes processus techniques sont assez simples. Mes images ne sont que des prises uniques : pas de double-exposition (intégré à l’appareil ou par logiciel).

Quand je prend des photos, les mouvements que je réalise sont vraiment aléatoires, j’obtiens donc des dizaines d’images qu’il me faut ensuite trier. Je sélectionne les quelques images qui méritent selon moi d’être éditées.

Avant de parler de post-production, il faut savoir que l’ICM a tendance à délaver les couleurs et les contrastes. Mon processus consiste donc à faire réapparaître les formes et les couleurs. J’utilise DXO Photolab et parfois Nik Software pour cela.

Je suis très à l’aise avec l’idée de ne pas utiliser Photoshop, puisque je ne l’ai jamais utilisé. Il n’est même pas installé sur mon PC, et je ne sais pas m’en servir.

Parlez-nous du projet ou du portfolio que vous nous présentez.

Les images sélectionnées viennent d’un projet plus large nommé « Mondes d’ailleurs ». Mon intention est de créer des images oniriques de la région.

Les images sont prises n’importe quand dans la journée (lever ou coucher de soleil, en pleine journée), quels que soient la lumière ou la météo. Je n’ai besoin que d’un bon point de vue et d’un bon sujet : bateaux, phares, églises ou chapelles… J’aime me servir de paysages communs pour les recréer en plus paysages imaginaires, où nos repères disparaissent.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous lancer dans ce genre de photos ?

Je vis dans une région où les paysages, marins ou non, sont très photographiés par une multitude de photographes. Il est difficile de se différencier et de créer des images originales.

J’ai découvert Andrew Gray et ses paysages abstraits, et j’ai trouvé que ce serait un bon moyen d’obtenir quelque chose de différent. J’ai expérimenté et développé cette technique, pour obtenir ce que je présente aujourd’hui.

Qu’est-ce qui vous motive à prendre des photos ? 

Ce qui me motive est très égoïste : se trouver dans un lieu inspirant est une excellente façon de se sentir bien ! A ce moment-là, je prends des photos pour extraire la magie du moment et la partager ensuite avec les gens.

J’aurais pu en dire beaucoup plus, mais ça fait déjà une belle vue d’ensemble de ma démarche, mon process (et même de mon matériel !)

Alors, qu’est-ce que vous en dites ? La frustration vous envahit et vous voulez en savoir plus ? Les commentaires en bas de la page sont là pour vous, lâchez-vous !